Le journal de Gérard

Fantasme ou conquête ?

Traversée par des milliers de cours d'eau, dont l'impétueux fleuve Amazone, la forêt Amazonienne s’étend sur neuf pays dont la Guyane française.

La forêt Amazonienne est une forêt qui vit au rythme des saisons sèches et des saisons des pluies. L’eau de pluie qui tombe en Amazonie provient essentiellement de l’évaporation de la végétation. La riche exubérance de sa flore et de sa faune nous fait oublier que la diversité de son écosystème est d’une fragilité consécutive à l’extraction de minéraux, à l’exploitation des arbres et à une agriculture incontrôlée.

Présentée comme un emblème d’abondance et de virginité, la forêt Amazonienne a été gratifiée malgré elle de la lourde responsabilité de «Poumon de la terre».

Puissante forêt Amazonienne, forêt des premiers âges, habitacle d’oiseaux multicolores, et des singes, demeure des jaguars, des anacondas, des caïmans et des piranhas, habitation des indiens, paisible, innocente, essentielle bouffée d'air de la planète, c’était sans compter sur une cohorte d’hommes avides et sans scrupules, de forestiers sans remords et de chercheurs d’or qui ont mutilé, souillé, l’âme et brisé l’harmonie de cette forêt majestueuse.

La forêt amazonienne est devenue une promesse de richesses pour des aventuriers qui ont tenté de percer ses secrets tout en alimentant les mythes de cette forêt mystérieuse. Les histoires rapportées par ces aventuriers, abreuvent encore les utopies d’une forêt pourvoyeuse d’Enfer vert ou d’Eldorado.

Le mythe de la forêt vierge inhabitée, sanctuaire des Indiens est aujourd’hui une sorte d’image virtuelle, une représentation surfaite, modelée par une vision fausse que l’Homme se fait de la nature.

Comment ne pas aborder la forêt amazonienne sans évoquer l’or ? Comment ne pas aborder l’or sans évoquer Christophe Colomb qui supposait que le précieux métal était engendré par le soleil.

Quel est donc ce mythe de l’Eldorado qui abreuve tant de légendes? Le mythe de l’Eldorado mêle des faits réels, imaginaires ou des légendes qui dévoilent les besoins de l’Homme de s’approprier des aventures fantasmagoriques.

Ce mythe semble remonter aux Conquistadors qui furent les témoins d’une cérémonie d’intronisation d’un Roi Chibchas. Durant la cérémonie, le futur Roi était recouvert de poudre d’or afin d’incarner le soleil. Le Roi s’immergeait dans un cours d’eau dans lequel les membres de la communauté jetaient des objets en or.

La ville légendaire de Manoa-Eldorado aux immenses richesses imaginaires serait enfouie dans lac Parimé, lac légendaire qui se situerait en Guyane française.

Pendant des siècles après Christophe Colomb, les marins qui ont longé les côtes de l’Amérique du sud entre les fleuves Orénoque et Amazone ont alimenté les légendes et les convoitises propres à enflammer l’esprit des aventuriers.

La conquête de l’or est abreuvée d’audace, d’espoirs et  de pulsions à vouloir aller toujours plus loin au-delà des limites de l’homme. C’est ainsi que les récits des aventuriers ont été agrémentés de fables qui pousseront d’autres apprentis aventuriers à la quête de richesses utopiques.

L’or se trouve à l’état pur dans la nature. Il n’est pas un simple métal, il est noble, il est inaltérable, il est « le » métal. L’or possède un esprit redoutable. L’or se déplace, il ne reste pas en place dans la nature. Il peut être invisible ou visible en pépite ou en paillette. L’or brûle les poches et les mains de celui qui le possède.

Des hommes avides fouillent le sol de la forêt et des cours d’eau dans l’espoir de s’enrichir, mais ce n’est pas celui qui creuse qui s’enrichit, c’est celui qui fait commerce de l’or et de tout ce qui gravite autour de ce précieux métal. L’or n’a pas d’odeur et pourtant les vents emportent partout son odeur, odeur de richesse, de rhum, de femmes et de rêves.

Alors l’Amazonie, fantasme ou conquête ?

Guyane avril 2019