Le journal de Gérard

Le journal de Gérard

Voleur de souvenirs

Rien n’est plus cruel que le vol des souvenirs personnels d’un être cher.

Quelles étaient les paroles de la chanson de Jeanne MOREAU ?   Ah oui !

 «J’ai la mémoire qui flanche,

J’me souviens plus très bien

Quel pouvait être son prénom

Et quel était son nom

Il s’appelait Je l’appelais

Comment l’appelait-ton ?

Pourtant c’est fou ce que j’aimais

L’appeler par son nom. »

 

Le temps a passé. Un an? Deux ans ? Trois ans? Nous n’avons pas vu le «Voleur de souvenirs» s’installer impitoyablement chaque jour un peu plus dans sa vie.

Aujourd’hui, on subit une situation sans espoir et sans issue, alors on s’accroche.

Ce mal qui lui a volé son cœur, son âme et ses souvenirs l’entraîne irrémédiablement  vers la perte progressive et irréversible de ses fonctions mentales.

Elle a oublié ce qu’était un rire ou un simple sourire. Elle a oublié aussi l’amour que lui portent ses enfants et ses proches.

Elle a oublié tout ce qui faisait ses joies. Seules restes ses angoisses.

Désormais, il faut accepter ses gestes et ses mots parfois durs envers ceux qui l’aiment.

Il faut savoir entendre ses incohérences, et chasser les voyous qui lui prennent ses biens les plus insignifiants.

Il faut accepter d’entendre toujours les mêmes paroles qui reviennent, et reviennent, et reviennent encore comme une litanie lancinante.

Il faut accepter que les portes de son esprit soient définitivement fermées à clé.

Il faut accepter tous ses objets qu’elle cache sans le savoir dans des endroits impensables.

Il faut accepter ses « tocs » les plus fous.

Il faut accepter ses déambulations jour et nuit et ne pas en vouloir à la tête qu’elle perd chaque jour un peu plus.

Elle est comme un verre d’eau qui se vide doucement et irrémédiablement par une minuscule brèche que nous ne pourrons jamais colmater.

Aujourd’hui, entend-elle encore cette musique que sont nos mots de réconfort et d’amour?

Pleure-t-elle intérieurement comme je la pleure ? Est-elle triste? Est-elle heureuse?

Comme il m’est difficile de garder assez d’amour en moi pour ne pas m’effrayer de cette nouvelle femme qui émerge de la mère tant aimée et devenue méconnaissable.

Tout d’elle est encore présent mais, sans « Elle » !

 

Givry Novembre 2012



08/11/2012
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